Manifeste pour l’écoute, cette qualité de leadership n°1

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Parler d’écoute. A quoi bon vous allez me dire, il suffit de tendre l’oreille. En quoi est-ce une qualité de leadership ?

Vraiment ? Mais qu’est-ce que l’écoute ?

Quand je parle d’écoute, je veux dire entendre et comprendre, tenir compte de ce qui est exprimé. C’est un acte volontaire, conscient. Et cela se passe au-delà des mots.

Dans notre monde déboussolé, l’écoute s’avère la qualité de leadership n°1 pour trouver le bon chemin. Ecouter veut dire reconnaître ce qui est là. L’écoute permet de comprendre la réalité des autres, d’apaiser les relations et de créer les nouveaux narratifs dont nous avons tellement besoin collectivement. 

La boussole

Les 4 types d’écoute de la théorie U

Depuis des années je suis les enseignements d’Otto Scharmer, fondateur du Presencing Institute et professeur au prestigieux Massachusetts Institute of Technology (MIT). Dans son œuvre sur la Théorie U*, ce puissant concept du changement systémique, il développe les 4 types d’écoute suivants pour répondre à la question – qu’est-ce que l’écoute ?

Type 1 – le téléchargement ou mode automatique.

Lorsque j’entends des choses auxquelles je m’attends, que je connais déjà, lorsque mon écoute ne fait que confirmer ce que je sais déjà, j’écoute en mode automatique. Je télécharge. Par exemple dans un échange ritualisé « Comment ça va ? » « Bien, merci. Et vous ? » Échange poli, on se conforme à ce qui semble correct. Pas besoin de réfléchir.

Combien de fois cela vous est-il arrivé aujourd’hui ?

Cette écoute automatique n’est ni bonne ni mauvaise. Dans certaines situations elle est adaptée, dans d’autres moins, comme tous les types d’écoute.

Mais l’écoute automatique limite les perceptions dans une conversation car on se conforme aux schémas mentaux préexistants et dominants, et cela peut créer un déséquilibre entre ce qui est dit et ce qui est la situation réelle. Dans une organisation dans laquelle prédomine ce type d’écoute, des dysfonctionnements organisationnels apparaîtront puisque les équipes évitent d’aborder les vrais sujets.

Type 2 – l’écoute factuelle ou le débat.

Lorsque j’écoute les faits, je prête mon attention à ce qui est nouveau, aux surprises, à l’inattendu. L’esprit ouvert, je mémorise ce qui dévie de mes attentes pour débattre et parler vrai. Je dis ce que je pense. « Comment ça va ? » « Ça ne va pas du tout. »

On exprime sa différence. On peut remettre en question les points de vue dominants et ainsi confronter ses idées à ceux des collègues voire des patrons.

L’expression de la variété des points de vue est l’essence de ce type d’écoute. Et cela peut créer des situations tendues dans lesquelles nous jouons de nos arguments pour l’emporter sur la personne dont le point de vue est différent. La guerrière se réveille. Ça vous parle ?

Type 3 – l’empathie ou le dialogue.

Écouter avec le cœur, c’est ce qui signifie l’écoute empathique. Regarder le monde, la situation, les choses du point de vue de l’autre. Pour cela il est nécessaire d’aimer l’autre. Pas toujours évident… 

Pour activer consciemment notre source d’écoute empathique, il est nécessaire de trouver la chose, aussi petite qu’elle soit, qui suscite en nous de l’intérêt et de l’appréciation chez l’autre, ainsi nous pouvons éveiller notre cœur. 

Quand j’écoute en mode empathique, je ne cherche pas à avoir raison, je cherche à comprendre. Je commence à explorer le point de vue de l’autre en écoutant ce qui se cache derrière les mots. Comment la personne se sent ? De quoi a-t-elle besoin ? Ainsi, mon propre point de vue s’élargit, le dialogue crée de la connexion. « Comment ça va ? » « Je ne sais pas trop, et vous, comment ça va ? » « Je ne sais pas trop non plus, j’ai un drôle de sentiment. » « Ah oui, intéressant. Racontez-moi, que se passe-t-il ? »

Type 4 – l’écoute générative ou la présence collective.

Ce type d’écoute ne peut pas être forcé. Nous ne pouvons seulement favoriser les conditions pour y accéder, par exemple par des cercles d’écoute, facilités par des personnes initiées. Etre avec ce qui est là et tenir l’espace pour ce qui souhaite émerger. Ne rien faire, seulement rester pleinement engagé pour activer le champ génératif. Ça sonne abstrait, je sais. C’est en faisant l’expérience qu’on comprend de quoi il s’agit.

Souvent on y accède par le silence, cet espace suspendu dans lequel on ne fait rien, ni interférer, ni se désengager. Puis la conversation qui suit, produit de l’énergie et de l’inspiration par le niveau des échanges. On ne s’approprie plus les idées, le groupe entre dans l’art de penser ensemble en laissant émerger les idées les unes les autres.

Exercice – Observez votre écoute

Passer d’un type d’écoute à un autre est parfaitement faisable. Tous les humains ont la capacité de pratiquer ces 4 types d’écoute, avec un peu d’entraînement disons ;-). 

Voici un exercice intéressant, que j’ai moi-même fait pendant que je suivais le programme de formation sur la théorie U, le Ulab, sur 4 mois. C’est très instructif et permet de s’entraîner à une écoute profonde.

Pendant une semaine, en fin de journée, posez-vous pour noter comment vous avez écouté dans la journée, quelle qualité d’écoute avez-vous porté à votre entourage.

Cahier d'écoute pour observers qu'est-ce que l'écoute

Qu’est-ce que l’écoute ? Le cahier d’écoute permet de s’observer afin de comprendre

Avez-vous pratiqué tous les types d’écoute ? Combien de pourcent pour quel type d’écoute ?  Quel écoute pour quelle situation? Avec quelles personnes ? Y a-t-il eu des situations dans lesquelles vous avez changé votre écoute ? Si oui, dans quel sens : Du factuel vers l’empathique, ou du factuel vers l’automatique ?

Prenez note et observez les changements.

Pourquoi je vous parle d’écoute ?

Nous vivons dans une période dans laquelle les principes et les concepts de gouvernance, de management, de leadership tels que nous les avons appris ne sont plus applicables. Ils ont été inventés dans un autre temps, à l’ère de l’industrialisation. Quand le monde du travail semblait plutôt prévisible, à l’époque on pouvait planifier, l’information était un gage de statut. C’était avant, le monde est différent maintenant.

Aujourd’hui nous vivons dans l’ère de l’information. Le web a démocratisé l’accès à l’information, les innovations technologiques évoluent de plus en plus vite, l’incertitude et la diversité des perspectives sont devenues la réalité. Dans ce monde appelé VUCA – volatile, incertain, complexe, ambigu – l’écoute est essentielle pour construire, pour créer les capacités de transformation. Et des nouveaux narratifs qui nous permettent de nous projeter, de créer un futur commun désirable.

Les leaders – et ma définition de leadership est très inclusive car je suis convaincu des capacités infinies de chaque être humain – sont obligé·e·s d’écouter profondément pour pouvoir inspirer quoi que ce soit. Cela implique d’inclure, de faire contribuer, de jouer collectivement.

La posture « Moi je sais et je vais vous dire comment faire » – ça ne marche plus !

D’ailleurs le concept n’est pas nouveau. Déjà 400 ans avant JC, Socrate l’a compris : “Je sais que je ne sais rien.” Et il se disait qu’avec cette découverte il était un tout petit peu plus sage que l’autre. L’autre qui en réalité n’en sait rien non plus, mais qui croit savoir.  Bueno ?

Et si collectivement nous intégrions cette attitude ? Cela nous obligerait d’être curieux et d’écouter profondément. Au profit de nos relations. Au profit de nos conversations. Au profit du business qui a toujours été et qui restera pour toujours une affaire d’humains.

L’écoute dans la communication non violente

Qu’est-ce que l’écoute ? Un autre concept que je trouve très intéressant pour y répondre et qui permet de communiquer selon un processus simple et efficace, c’est la Communication Non Violente (CNV). Créée par Marshall B. Rosenberg dans les années 1970*, cette démarche nous aide à renouer avec une qualité d’écoute de nous-même et de l’autre. Un processus de communication efficace, une invitation à reconsidérer comment nous nous exprimons, nous écoutons et entrons en relation.

Voici le principe de base :

1. Je partage mes observations, les faits, sans jugement

2. J’exprime mes sentiments dans la situation

3. Quel était ou est mon vrai besoin ?

4. Quelle est la demande que je peux faire pour nourrir mon besoin ?

La girafe, mammifère au grand cœur et symbole de l’écoute empathique de la CNV

Le postulat de base de la CNV est que les besoins humains sont universels. Mais les stratégies pour nourrir nos besoins diffèrent. Et c’est là que se cachent les conflits. L’écoute empathique entre les parties prenantes permet de mettre en lumière ce qui facilite ou entrave la relation, les émotions et les besoins.

Il s’agit d’explorer, sans jugement, ce qui se passe pour l’autre, son vécu, son ressenti. On accompagne, on laisse s’exprimer, on reste avec l’autre. On l’aide à exprimer ses besoins – qui ne sont pas des stratégies. Et des demandes – qui ne sont pas des exigences. 

L’écoute empathique grandit avec la pratique. Il n’y a pas de bien ou de mal du moment où on reste avec l’autre, pas de devoir ou de falloir – juste être.

En appliquant les principes de la CNV à nos conversations, nous développons un climat de confiance et de coopération. La base est de porter notre attention sur ce qui est en jeu chez nous-même et chez l’autre, de le déceler, de l’exprimer et d’accueillir l’autre. Ainsi on approfondi l’écoute.

Écouter ne veut pas dire être d’accord. Écouter ne veut pas dire souscrire aux besoins de l’autre. Écouter veut seulement dire que je reconnais que cet être humain est là, est présent, et a le droit d’exister. 

Résultat ? La reconnaissance est miroitée. Ne manquons-nous pas souvent de reconnaissance au travail ? Et bien voilà. 

Vous pensez ne pas avoir le temps pour écouter ? Pourtant, le temps consacré à l’écoute fait que le résultat s’ajuste. Ainsi on gagne du temps car on s’engage et on engage son entourage sur le bonne voie plus vite. En écoutant on crée une connexion, un NOUS, qui nous emmène à trouver des solutions gagnant-gagnantes.

Cette capacité de vraie écoute, profonde et sincère est une capacité de leadership qui fait la différence dans notre monde d’aujourd’hui.

Ce sont celles et ceux qui ont les antennes les plus fines pour écouter ce qui se passe autour d’eux qui savent détecter les signaux faibles. Qui savent le mieux impulser la bonne direction et fédérer les gens autour d’ objectifs justes. Et c’est ainsi que nous pourrons écrire de nouvelles histoires et imaginer un futur qui donne envie. Pour le business de demain. 

Alors, qu’est-ce que l’écoute ? La qualité d’écoute présente dans un groupe influe fortement la qualité relationnelle et interactionnelle de ce groupe, elle est la base de la confiance, de la sécurité psychologique et ainsi de la performance. L’écoute est un puissant levier de transformation et nos programmes et accompagnements sont tous fondés sur cette ambition d’instaurer l’écoute dans les organisations. Pour libérer leur plein potentiel. Pour faire éclore l’excellence des équipes. Pour aller de l’avant. C’est ainsi que nous apportons notre pierre à l’édifice pour transformer le monde.

Et nous sommes à votre écoute pour vous accompagner sur le chemin contact@attitude-concept.com 

*Sources :

Théorie U – l’essentiel. Otto Scharmer, 2018. Editions Yves Michel
Les mots sont des fenêtres. Marshal Rosenberg, 2003. Editions La Découverte

Sarah Neumann appreciative leadership consultant

Sarah Neumann

Faites briller vos équipes avec l'Appreciative Inquiry | Management interculturel | Diversité, inclusion, égalité FH | Fondatrice Attitude Concept & Cofondatrice Sororistas

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